- Lettre du bout du monde -
Le Farwest norvégien
Aujourd'hui encore, il a tourné au coin de la rue, des lunettes sur les yeux, à ses mains la laisse d'un chien de traîneau, sur son dos une une carabine chargée. Il marche de façon décontractée, tranquille et naturellement il rentre dans le seul commerce de l'île, va faire ses quelques courses et regagne son habitation, perchée en haut d'une montagne.
78° 14 min Nord. 15° 30 min Est. Longyearbyen. 1 000 habitants, un aéroport, un port, trois rues, et 5 000 ours. Bienvenue.
Encerclé de mer et de montagnes, la seul marque de l'homme reste ces grands poteaux de fer rouillé liés entre eux. Jadis ils transportaient les wagons des mines de charbon. Calme et tranquillité garantie. Du moins presque, nous sommes un peu au Farwest, un Farwest norvégien. Loin des signalisations de la sécurité routière française "attention aux cerfs", "attention à la sortie d'école", il se dresse ici sur les routes des panneaux triangulaires rouges "attention aux ours". L'un de ces spécimens a été signalé à proximité de l'aéroport une semaine avant notre arrivée. Deux jours après notre venue sur l'île, l'équipage nous présente les deux armes à feu en leur possession. Des armes louées sur place. Ici le port d'arme est obligatoire.
Les nôtres possèdent une gravure d'environ deux centimètres à côté de la sécurité : un aigle, les ailes ouvertes, à ces pieds une croix gammée. Triste patrimoine, d'une époque où le Spitzberg était l'enjeux de toutes les convoitises. Route du Nord entre américains et russes.
Pour 30 couronnes norvégiennes, tout l'équipage a au moins une fois magné l'arme. Étrange ambiance.
A minuit dans ma cabine de La Malouine, le soleil est environ à la même hauteur qu'à 14 heures lors d'une journée de février à Metz. Il se joue de nous, toujours installé confortablement à la même hauteur, il nous tourne au tour, joue à cache-cache; je suis ici ! non de l'autre côté maintenant ! Nous sommes épuisés, nous ne savons plus à quelle heure nous vivons, quel jour. les soirées sont trop longues.
Le froid, pas si froid, 7 ou 8 degrés pas plus, quelques norvégiens habitués sont même installés en terrasse du bistrot local, ambiance trappeurs et confort nordique.
A bord de La Malouine, David le Capitaine, Julien le Second, et JJ le mécano s'activent avant le départ. Farid, Caroline, et les autres ont déjà pris possession de leur cabine. dans quelques heures nous larguerons les amarres. Cap vers le Nord et la baie de Copper Camp. Il y a longtemps déjà, les pêcheurs de baleines, venus de France ou d'ailleurs avaient l'habitude d'y jeter leur ancre. Tout au long de notre périple, nous suivrons leur trace. Mais je dois vous quitter, on m'appelle sur le pont et la cloche de La Malouine a déjà donné le signal du départ.
Amicalement du bout du monde.
A bord de La Malouine.
Anaïs
Le mardi 18 juillet 2012
Le mardi 18 juillet 2012